La bibliothèque, la comm’ et la came
Question de départ (posée en partie ici) : comment une bibliothèque peut-elle proposer à ses lecteurs tous ses trucs et ses machins, extensions Firefox, barre d’outils, plugins de recherche rapide, bibli.othequ.es, etc. ?
Pour ça, il faut d’abord partir des pratiques des internautes et de ce qui peut les stimuler suffisamment pour installer quelque chose de vous dans leur « espace » (que cet espace soit leur univers Netvibes, leur compte Facebook, leur navigateur ou leur PC), vous laissant ainsi une place dans leur univers.
1. Les charlatans du web
J’ai vu ces derniers temps plusieurs articles décrivant « la » bêtise des internautes, ou leurs pratiques ovines. Thierry Crouzet en a dénoncé un récemment.
Ce qui permet de les reconnaître : ils décrivent les pratiques des autres. Ni les leurs, bien sûr, ni les vôtres (puisque vous les lisez, c’est que vous êtes intelligent), mais celles des autres.
On va les oublier vite fait. Définitivement.
2. Hypothèse de travail (ou : système copernicien et réalité galiléenne)
Je n’ai lu aucune étude sur la question (pas même Les pratiques culturelles des Français à l’heure du numérique, mais je vais m’y mettre, promis). Je ne suis pas un spécialiste des usages du web, je suis juste un gros consommateur.
Et je vais me lancer dans une description de ces usages, sans aucune légitimité.
Mais mon but n’est pas de refléter la réalité des comportements : mon but est de poser les bases d’une hypothèse de travail me permettant ensuite d’élaborer une stratégie de communication à destination des internautes que je veux inciter à installer mes outils.
Bref, mes observations peuvent être fausses, elles me suffisent tant qu’elles me permettent de dire comment proposer LibX à mes usagers.
C’est toute la différence entre Copernic et Galilée :
- Copernic a élaboré un système héliocentré visant à faire des prédictions quant à la position des astres (éclipses, durées des journées, etc.). C’était le seul objectif de son travail.
- Galilée a décrété que ce système était la réalité de l’univers tel qu’il tournait, et que même si le système de Ptolémée permettait de faire lui aussi des prédictions, il ne fallait plus s’en servir car il était simplement faux.
Ici, je me prends pour Copernic, non pour Galilée.
Et voici ce que j’affirme sur les internautes qui peuvent visiter un site de bibliothèque, tomber sur une page « Boîte à outils » et être invité à installer le plugin de recherche rapide ou l’extension Firefox.
3. Tous des faignants
L’internaute est faignant (ou pressé)
L’internaute ne prend en compte que ce qui correspond à des besoins non encore assouvis
Cet aspect là est intéressant et permet de comprendre pourquoi MSN continue de bien marcher chez les 15-25 ans, alors que Twitter « prend » moyennement : Twitter ne satisfait pas un besoin antérieur à sa création. En revanche il comble ceux qui ont pris l’habitude de s’en servir (cf. Twitter, c’est comme la prière).
Sa bienveillance à votre égard n’est pas acquise
Pour prendre une décision (installer ou pas installer) de la part d’une source de notoriété moyenne (sa bibliothèque, c’est pas un friend sur FB, quand même), il faut le convaincre que ça vaut la peine.
Il aime bien s’amuser en travaillant (ou travailler en ayant l’impression de s’amuser)
il faut le séduire et lui laisser comprendre que ce qu’on propose est fun ou cool
La vidéo de Zotero sur Zotero.org est excellente, très claire, son scénario est limpide et évident : en 3 phases, on explique qu’avec Zotero on peut :
- charger rapidement des notices
- gérer une base de références
- les utiliser dans un traitement de texte
Mais le texte est très descriptif, explicatif. Il est neutre. Il manque la petite musique techno (celle qui est censée vous faire acheter frénétiquement dans les grands magasins) et un ton de voix qui laisse entendre que faire de la biblio, c’est trop marrant. Il faudrait plutôt ce ton-là, plein de points d’exclamations et d’enthousiasmes débridés.
L’argument « Zotero changera votre vie à tout jamais » ne doit pas effrayer !
Il se décide vite et il ne lui faut pas longtemps pour décider de partir
Donc pour le convaincre vous avez le choix entre :
- deux à quatre lignes de texte (préférez les puces : pas de paragraphe de 6 lignes !)
- une à quatre images
- une courte vidéo (2 minutes MAXI)
Dans ce texte, ces images ou cette vidéo, vous n’expliquez pas le fonctionnement de l’outil, vous expliquez quel besoin il satisfait.
Il ne lit pas les modes d’emploi et les tutoriels
Vous lisez le mode d’emploi de votre télé, vous ? Et de votre mobile ? De votre appareil photo ? De votre voiture ? Alors laissez croire l’utilisateur que ce que vous lui proposez se passe de mode d’emploi. S’il est concerné par le besoin que vous prétendez combler, il trouvera tout seul. Ou alors il trouvera une partie des fonctionnalités (celles qui l’intéressent).
C’est seulement s’il veut aller plus loin qu’il faut lui fournir des explications complémentaires :
- l’accès à ces infos ne sera pas trop visible depuis la page d’installation de l’outil (sinon vous laissez entendre que leur lecture est nécessaire à son utilisation de base)
- ces infos doivent être présentées de manière très découpée, quasiment sous forme de FAQ. Pas de présentation de l’outil en partant de l’outil, mais une série de manipulations correspondant à des situations réelles : quand il va vouloir accéder au mode d’emploi, l’usager va n’être intéressé que par une partie de ce mode. DONC :
- Pas de PDF (ou alors avec une belle, courte et simple table des matières)
- Une liste de manipulations cliquable, pointant vers l’intérieur de la page web ou de courtes pages pour chaque manip.
N’essayez pas de lui refourguer de force votre tutoriel : facilitez-lui l’accès à un segment de votre tuto.
Il n’y a pas que vous dans sa vie
Donc dites-lui bien que s’il installe votre outil :
- ça ne le gênera pas pour ses autres activités d’internautes (le plugin de recherche ne prend pas de place sur l’écran)
- il pourra faire plein d’autres choses avec correspondant à ses besoins (recherche Youtube, recherche d’emploi, etc.)
- il n’aura plus besoin de venir sur le site de la bibliothèque pour en utiliser tous les services (dissémination)
- etc.
Encouragez-le à n’être pas que lecteur, puisque c’est définitivement le cas.
Exercice pratique : LibX
- Un message court pour proposer de mettre en place une barre d’outil, sur le thème : Ne cherchez plus les livres dans le catalogue de la bibliothèque, trouvez-les directement sur Internet
- Une vidéo montrant une recherche Google sur un titre, ramenant vers Amazon, et un clic vers la bibliothèque. Puis un passage sur le site de la Fnac -> rebond vers la bibliothèque. Puis un passage sur un blog parlant d’un bouquin vachement bien -> rebond vers la bibliothèque.
<update>Pour valoriser l’ensemble de ces outils et les attirer sur des pages tels que « Boîte à outils » ou autres, je me demande si un encart « Le truc du mois » sur la page d’accueil de la bibliothèque ne serait pas approprié.
Cet encart présenterait en boucle les différents outils, au même titre que d’autres non produits par la bib : Extension Add to Search Bar, bibli.othequ.es, Zotero, etc.</update>
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